DYNAMIQUES DES ENTREPRISES AGROALIMENTAIRES DU LANGUEDOC-ROUSSILLON
STRATÉGIE D'INNOVATIONS DANS LES PME AGROALIMENTAIRES DU LANGUEDOC-ROUSSILLON
Introduction
L’un des plus grands mérites que Гоп doit au modèle
taylorien-fordiste de production est sans doute la
recherche, avec succès, des gains de productivité. Cela s’est
traduit concrètement par des effets complémentaires :
baisse des prix, hausse des salaires et augmentation des
profits, et surtout avènement d’une production et d’une
consommation de masse. L’exigence des marchés des
années 80 a mis la logique de l’ancien modèle de
production, des biens standardisés, dans une sorte
d’impasse et de non-réactivité au moment où apparaissaient
de nouvelles attentes des consommateurs. La qualité et la
différenciation des produits sont désormais un passage
obligé pour capter de nouveaux marchés, ce qui suppose
pour les entreprises d’adopter un comportement pro-actifi
Dans ce contexte est apparu un autre modèle basé sur
d’autres principes de production, celui des entreprises
japonaises qui ont su répondre par la variété des choix,
une offre de meilleure qualité à prix compétitifs, ce qui
correspondait aux exigences du marché. Mais une
question cruciale se posait à cette époque aux dirigeants
japonais, et plus particulièrement à Ohno, alors ingénieur
en chef chez Toyota : "... que faire pour élever la
productivité quand les quantités n'augmentent pas ?”
(Ohno, 1978, - cité par Coriat, 1997). Cela revient à
rechercher des gains de productivité inédits, à concevoir
des formes d’organisation nouvelles, en dehors des
ressources liées aux économies d’échelles et de la
standardisation (Aoki, 1990). Autrement dit, à innover.
Cette innovation a permis aux constructeurs japonais de
gagner une position favorable sur le marché de
!’automobile et ainsi, de conserver un avantage
concurrentiel et de l’améliorer sur un marché qui n’était
pas le leur. "... Ils ont innové en se faisant les pionniers
de la production juste-à-temps et d'autres pratiques
de qualité et de productivité” (Porter, 1999).
Dans son acception la plus large, innover consiste à
mettre sur le marché un produit nouveau ou ayant des
caractéristiques nouvelles ou à introduire un nouveau
procédé de fabrication ou une forme originale
d’organisation dans l’entreprise (Schumpeter, 1935).
L’innovation peut être considérée comme une réponse
d’adaptation réactive ou proactive à un environnement
extérieur. Elle est le résultat du développement des
ressources et compétences internes de l’entreprise,
mobilisables au sendee de son offre.
Dans les industries agroalimentaires, les innovations
sont de faible intensité technologique (Mangematin,
Dufour, et al, 2001). Le tissu agro-industriel dont le rôle
est la transformation des matières premières agricoles et
la mise sur le marché des produits alimentaires est
constitué par des PME et des grands groupes industriels.
Cet ensemble forme un oligopole à franges (Rastoin,
1994). Les grands groupes industriels représentent 5 o∕o
de la population des entreprises mais détiennent 60 o∕o
des références dans la grande distribution. A leur côté,
les PME agroalimentaires opèrent avec des moyens -
tant financiers qu’humains- plus réduits, notamment en
ce qui concerne les activités liées à la R&D. Cette réalité
semble pénaliser les PME dans leur effort d’innovation.
Les activités de R&D dans ces dernières ont souvent un
caractère informel, et il est difficile de spécifier l’origine
et le mode de développement de l’innovation dans ces
organisations (Julien et Carrier, 2003). Ce constat nous
amène à poser une question à deux volets :
Comment les PME agroalimentaires développent-elles des
capacités pour innover et quelles stratégies de marché
mettent-elles en œuvre ?
De cette question découle un certain nombre
d’interrogations qui visent la compréhension des
conditions d’émergence des innovations dans les PME
agroalimentaires. Ces conditions concernent les aspects
liés à la structure du marché agroalimentaire d’une part,
et à la structure interne des PME d’autre part.
Globalement, une stratégie d’innovation suppose la
mobilisation et la combinaison de ressources internes et
externes à !’entreprise pour réaliser des projets
d’innovation.
Pour essayer d’éclairer ces propos, nous présentons dans
un premier temps quelques approches théoriques de
l’innovation, en nous focalisant sur le secteur
agroalimentaire. Ces éléments théoriques seront ensuite
articulés autour d’une étude empirique s’appuyant sur
une enquête portant sur les “facteurs de
développement des entreprises agroalimentaires du
Languedoc-Roussillon" Cette enquête a été réalisée en
2003 auprès de plus de 500 entreprises dont une
majorité de PME, dans le cadre du programme national
DADP (Délégation permanente à !’agriculture, au
développement régional et à la prospective) lancé par
UNRA. L’analyse portera principalement sur les
résultats concernant les “réseaux d'innovation de
l'entreprise”.
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