120 André Chevrillon
confondait au ciel, des fleuves enveloppés de pays inconnus.”
Et avec quelle admiration un autre historien américain, Mr.
John Finley, a évoqué ceux qui portèrent au cœur de
l’Amérique la Croix et les Fleurs de Lis. “Des gentils-
hommes,” dit-il, “nourris de savoir antique, des prêtres pâlis
dans les cloîtres, et qui ont passé dans ce monde sauvage le midi
et le soir de leur vie, gouverné avec douceur, paternellement,
les hordes des Peaux-Rouges, affronté avec sérénité les
formes les plus effroyables de la mort.” Et il ajoute: “Cet im-
mense domaine que ces Français ont donné à la civilisation,
la France ne les perdrait tout à fait que si elle oubliait.”
Elle n’oublie pas, et c’est pour célébrer la mémoire de ces
intrépides découvreurs que nous sommes venus de l’autre
côté de !’Océan nous réunir avec vous dans la capitale mari-
time du vaste pays qui fut notre Louisiane, où se perpétue
dans la liberté et la paix de la grande République Améri-
caine une population de race française et qui elle non plus
n’a pas oublié.
Notre Mission s’est placée sous le vocable de Cavelier de
La Salle qui périt si tragiquement, il y a deux cent cinquante
ans, près de cet estuaire du Mississipi dont il avait ouvert
le chemin depuis le Canada, au prix de quels efforts infati-
gablement répétés, d’une volonté toujours tendue vers le
même but.
C’est son admirable figure, sa vie, son œuvre héroïque que
je voudrais essayer d’évoquer,—mais peut-on parler de La
Salle sans rien dire de ceux qui l’avaient précédé, les premiers
pionniers de la France Américaine?
Cartier in 1534 avait exploré le Golfe du Saint-Laurent;
revenant l’année suivante, et puis encore en 1536 et 1541,
il avait dépassé la falaise de Quebec, le site de Montréal,
et il était allé jusqu’aux premiers rapides. Au début du
XVIIème siècle, Champlain que Parkman compare au