La mobilité de la main-d’œuvre en Europe : le rôle des caractéristiques individuelles et de l’hétérogénéité entre pays
D’un point de vue comparatif, les matrices de transition font également apparaître des diffé-
rences importantes entre pays. Si l’on choisit de se concentrer sur les transitions favorables
(vers l’emploi), on observe ainsi que le taux de transition annuel du chômage vers l’emploi
dépasse 40 % au Royaume-Uni, en Norvège, en Suède, en Autriche ou encore en Lituanie,
tandis qu’il se situe entre 20 et 25 % pour la Slovénie, le Portugal, ou la Pologne (graphique 1).
Le taux de transition annuel de l’inactivité à l’emploi est compris entre moins de 3 % pour la
France, la Slovénie, la Belgique, les Pays-Bas et plus de 8 % pour le Danemark ou la Norvège
(graphique 2).
De manière générale, et sans présumer du degré d’hétérogénéité très important selon les
transitions considérées, qui rend les comparaisons globales difficiles, des groupes de pays se
distinguent les uns des autres. Les pays du Nord (Norvège, Suède et Danemark) sont carac-
térisés par des transitions plus importantes du non emploi vers l’emploi. La Lituanie et le
Royaume-Uni apparaissent proches de ce premier groupe. La France, l’Italie, ou la Belgique,
présentent des profils différents, avec une forte probabilité de rester en emploi pour les
personnes déjà en emploi, et à l’inverse une part plus faible de transitions depuis l’inactivité
et le chômage vers l’emploi (cf. graphiques 1 et 2, et l’annexe C). On peut également
souligner quelques pays très spécifiques, comme les Pays-Bas ou la Hongrie qui se distin-
guent par leur probabilité de transition de l’emploi vers l’inactivité : elle s’élève à plus de
10 %, soit la plus élevée des pays de la base, la moyenne étant de 5,3 %. Ceci oriente vers
l’hypothèse selon laquelle l’inactivité occupe une place particulière dans ces pays, en
particulier pour les femmes11.
Ces statistiques descriptives révèlent l’importance des transitions et de la mobilité de la
main-d’œuvre sur le marché du travail en Europe. Elles confirment l’importance de
l’hétérogénéité selon deux dimensions : les caractéristiques individuelles, et les pays. Dans
l’analyse qui suit, nous tenterons d’approfondir l’analyse des facteurs individuels jouant sur
les transitions à partir d’approches, toutes choses égales par ailleurs. L’hétérogénéité
internationale sera prise en compte au travers d’effets fixes pays.
4. LES TRANSITIONS ENTRE DIFFÉRENTS STATUTS SUR LE MARCHÉ
DU TRAVAIL
D’après les études existantes (OCDE, 2009 ; Commission européenne, 2009), il semble que
le sexe, l’âge et le niveau de diplôme jouent un rôle dans la structuration des transitions entre
les principaux statuts sur le marché du travail. Toutefois, ces résultats sont obtenus sur la
base d’analyses descriptives, alors que la base SILC nous permet d’isoler les effets des
différentes caractéristiques individuelles en utilisant des régressions logistiques. De plus, elle
comprend également des informations sur l’état de santé déclaré et sur la situation familiale,
dont on sait qu’elle joue un rôle sur les décisions d’offre de travail. Notre analyse cherche à
identifier l’effet de ces caractéristiques sur les transitions entre trois états, l’emploi, le
chômage et l’inactivité, en prenant en compte l’hétérogénéité entre les pays européens, dont
on a vu l’importance au travers des statistiques descriptives.
Dans ce qui suit nous nous intéresserons tout d’abord aux facteurs influençant la probabilité
de rester en emploi, ou à l’inverse d’en sortir vers l’inactivité ou le chômage, sur la base
11 La part des transitions de l’emploi vers l’inactivité est en effet nettement plus élevée pour les femmes dans ces pays,
avec 15 % pour la Hongrie et 17 % pour les Pays-Bas (la moyenne de la base se situant à 7 % pour les femmes).
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