La mobilité de la main-d’œuvre en Europe : le rôle des caractéristiques individuelles et de l’hétérogénéité entre pays
On constate que l’éducation est corrélée positivement avec la stabilité dans l’emploi : les
individus plus qualifiés ont plus de chances de rester en emploi que les individus moins
diplômés. Les diplômes constituent donc une protection à la fois contre le chômage et contre
l’inactivité.
Par ailleurs, selon ces résultats, les femmes sont plus susceptibles que les hommes en
moyenne et toutes choses égales par ailleurs de connaître une transition vers le chômage. Cet
effet différencié selon le genre est encore plus marqué lorsqu’on observe les transitions vers
l’inactivité.
L’âge joue aussi un rôle important dans les transitions entre emploi, chômage et inactivité. Les
individus âgés de 15 à 24 ans ont plus de chances de transiter vers le chômage ou l’inactivité
que de rester en emploi comparativement aux individus âgés de 25 à 54 ans. En revanche, les
travailleurs de 55 à 64 ans ont à la fois moins de chances de transiter vers le chômage et plus
de chances de transiter vers l’inactivité en partant de l’emploi, en comparaison par rapport aux
25-54 ans. Ceci semble concordant avec l’idée selon laquelle les transitions hors de l’emploi
des travailleurs seniors se font le plus souvent directement vers l’inactivité, plutôt que via une
période de chômage.
On constate également que les personnes vivant en couple (mariés ou en concubinage)
présentent une probabilité plus faible de transiter de l’emploi vers le chômage que les
personnes ne se déclarant pas en couple. En revanche, elles connaissent une probabilité plus
forte de passer de l’emploi vers l’inactivité. On peut supposer que la vie maritale constitue une
proxy pour un certain nombre d’autres variables non observables jouant positivement sur le fait
d’avoir un emploi. L’impact positif de la variable « couple » sur la probabilité de transiter de
l’emploi vers l’inactivité est très certainement à relier aux trajectoires des femmes quittant le
marché du travail plus ou moins temporairement pour s’occuper de leurs enfants.
Enfin, les personnes en mauvaise santé connaissent des transitions plus défavorables : elles
ont plus de chances de transiter vers le chômage ou l’inactivité comparativement à des
individus en bonne santé.
L’introduction d’indicatrices de pays fait ressortir différentes spécificités nationales en
particulier concernant le rôle de l’inactivité (les résultats détaillés sont présentés en annexe
dans le tableau C1). Rappelons ici que le pays de référence étant l’Allemagne, les compa-
raisons se font par rapport au marché du travail allemand. On constate que la Hongrie et
surtout les Pays-Bas sont caractérisés par des transitions très importantes de l’emploi vers
l’inactivité. Ceci confirme l’hypothèse d’un rôle particulier joué par l’inactivité sur le marché
du travail dans ces deux pays, qui apparaissait déjà au travers des statistiques descriptives de
la section 2. On peut faire l’hypothèse qu’il s’explique par deux facteurs principaux, les
retraits temporaires d’activité des femmes (mentionnés dans la section 2), et par ailleurs la
place des pensions d’invalidité dans le système de protection sociale : malgré des efforts de
réforme visant à faciliter les retours vers l’emploi, près de 8 % de la population en âge de
travailler percevait une prestation d’invalidité aux Pays-Bas en 2007, et 12 % en Hongrie
(contre moins de 6 % en moyenne dans l’OCDE ; OCDE, 2009). À l’inverse, les travailleurs
vivant en France, en Grèce, en Pologne, en Suède, en Slovénie et en Slovaquie ont une
probabilité plus grande de transiter de l’emploi vers le chômage et moindre de passer vers
l’inactivité. On relèvera également que le fait de vivre au Royaume-Uni réduit la probabilité
de transition emploi-chômage, l’effet sur le passage en inactivité étant non significatif.
Les mêmes facteurs individuels ont un impact sur les transitions depuis le chômage ou
l’inactivité. Les résultats détaillés, incluant les effets fixes pays, sont présentés dans les
tableaux C2 et C3 en annexe.
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