La mobilité de la main-d'œuvre en Europe : le rôle des caractéristiques individuelles et de l'hétérogénéité entre pays



La mobilité de la main-d’œuvre en Europe : le rôle des caractéristiques individuelles et de l’hétérogénéité entre pays

De ce fait, il rejoint également d’autres travaux socio-économiques qui se concentrent sur les
choix des travailleurs ou plus largement des personnes en âge de travailler, tels que les
approches en termes de « marchés transitionnels » (Schmid, Gazier, 2002 ; Muffels, 2008),
qui insistent d’une part sur l’importance croissante de la mobilité entre les différents états sur
le marché du travail, emploi, chômage et inactivité, mais aussi au sein de l’emploi, et d’autre
part, sur le développement des situations intermédiaires entre ces états, telles que l’emploi à
temps partiel, la formation professionnelle, les congés parentaux, etc. Dans cette perspective
il apparaît nécessaire de progresser dans la connaissance de ces différentes transitions et de
leurs déterminants, un problème majeur étant les inégalités entre les groupes sociaux du point
de vue de la mobilité : les bonnes transitions tendent à se concentrer sur les individus
favorisés, tandis que les risques d’enfermement dans des trajectoires d’exclusion du marché
du travail, ou de temps partiel subi, concernent plus particulièrement certains groupes, tels
que les femmes, les non qualifiés, les seniors, etc. Enfin, la mobilité et la qualité des
transitions constituent un objectif explicite des politiques publiques, en particulier en Europe.
La stratégie de « flexicurité » définie depuis 2007 par l’Union européenne3 met l’accent sur
l’importance des mesures d’accompagnement et de sécurisation des transitions, en particulier
sur le retour à l’emploi via les politiques actives de l’emploi et l’accompagnement des
chômeurs, mais également le soutien au maintien dans l’emploi des salariés à haut risque de
sortie vers l’inactivité (seniors, femmes, etc.). Par ailleurs, l’objectif de « qualité de l’emploi »
présent dans la Stratégie européenne pour l’emploi (SEE) inclut une dimension dynamique : les
transitions entre le non emploi et l’emploi font en effet partie des indicateurs de qualité de
l’emploi définis à Laeken en 2001 (Davoine, Erhel, 2008). Cependant, en grande partie du
fait de problèmes de disponibilité des données, un nombre limité d’études a analysé ces
transitions dans une perspective comparative.

La littérature empirique sur les flux sur le marché du travail aborde essentiellement deux
questions. Premièrement, elle analyse la variabilité des flux entre pays, et cherche à la relier
aux différences institutionnelles. Il apparaît essentiellement que la mobilité est plus impor-
tante dans les pays anglo-saxons, ce qui oriente vers l’hypothèse selon laquelle le degré de
protection de l’emploi réduirait les flux de réallocation de l’emploi (Haltiwanger
et al.,
2006). Deuxièmement, ces travaux s’intéressent aux déterminants individuels des flux, tant
du côté des flux d’emplois (créations et destructions) que des transitions des travailleurs. Les
facteurs jouant sur les rotations d’emplois dans les entreprises sont principalement la taille et
le secteur d’activité : les flux d’emploi et de main-d’œuvre apparaissent plus importants dans
les petites entreprises, et dans certains secteurs tels que l’hôtellerie-restauration, la construc-
tion, les activités immobilières (OCDE, 2009). Du côté des travailleurs, les caractéristiques
individuelles telles que l’âge, le genre, ou le niveau de diplôme jouent sur les transitions. Les
jeunes, les femmes, et les non diplômés connaissent globalement davantage de mobilité entre
emploi et non emploi (inactivité ou chômage), mais les femmes et les non diplômés ont une
plus faible probabilité de connaître une transition favorable (
i.e. vers l’emploi) (Commission
européenne, 2009).

Les limites principales des travaux centrés sur les transitions individuelles sont de trois ordres.

travailleurs est possible, comme dans le cas du Longitudinal Employer Household Dynamics (LEHD) américain (Davis et
al.
, 2006).

3

Voir la communication de la Commission du 27 juin 2007 : « Vers des principes communs de flexicurité : des emplois
plus nombreux et de meilleure qualité en combinant flexibilité et sécurité » (COM (2007)359).



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