3.2 Le poids du passé
L’étude sur te temps long des trajectoires des politiques malgaches et maliennes, met en
évidence des éléments explicatifs des formes revêtues par les politiques de développement
durable. Ces éléments renvoient à l’existence et au maintien d’asymétries de pouvoir, à des
effets de coordination et à des dynamiques lentes d’évolution des mentalités.
3.2.1 Asymétries de pouvoir
Nous venons de voir que les relations entre bailleurs et gouvernements façonnaient le
déroulement des jeux politiques. L’empreinte des bailleurs reste primordiale au Mali, ce qui
explique partiellement que le gouvernement multiplie les affichages en terme de
développement durable (volonté de faire « bonne figure » sur la scène internationale) sans que
cela ne corresponde réellement à une priorité de développement ni que cela ne donne lieu à
des actions. Les relations entre gouvernements et représentants de la société civile sont
également marquées par l’existence d’asymétries de pouvoir qui ont tendance à se maintenir,
et qui expliquent par exemple l’attention privilégiée que reçoivent les conservationnistes à
Madagascar depuis la période coloniale (emprunt d’un même sentier) et les producteurs
agricoles au Mali depuis la révolution de 1991, significative d’un basculement du rapport de
force en faveur des classes populaires (rupture institutionnelle, création d’un nouveau sentier).
3.2.2 Effets de coordination
Madagascar se caractérise par une tradition ancienne d’intervention publique en milieu rural,
ces interventions ayant accompagné la construction de l’Etat malgache. Les premières
politiques agricoles et environnementales ont été mises en place dès le XVIIIème siècle. Les
mesures environnementales ont vite acquis une certaine autonomie, ce qui peut expliquer que
la dimension environnementale occupe aujourd’hui une place primordiale dans les politiques
malgaches de développement durable mais aussi que la durabilité ne soit pas conçue comme
étant en lien direct avec le développement agricole et rural. Il est moins coûteux au
gouvernement malgache de concevoir le développement durable comme relevant
principalement du domaine environnemental que de chercher à refondre les politiques
environnementales et agricoles.
Au Mali, nous avons vu que les interventions publiques en milieu rural, plus récentes, avaient
toujours été orientées préférentiellement vers les secteurs stratégiques que sont la production
de riz et de coton. Par ailleurs, la question environnementale s’est structurée à partir d’un
problème de diminution du potentiel productif agricole. La prise en compte de ces deux
26