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il n’existe malheureusement aucun projet de reconstitution du discours théorique et
critique de Prévert sur la littérature, ni d’anthologie regroupant les correspondances ou
les entretiens journalistiques du poète. Mon étude constitue donc un premier pas dans
cette direction : dévoiler le discours de Prévert concernant divers aspects touchant à la
littérature, et en particulier au pouvoir de subversion sociale et à l’accessibilité de la
création poétique, ainsi qu’au rôle — ou tout du moins à l’influence possible — de
l’écrivain sur les classes populaires et la société en général.
Dans le cas de Césaire, beaucoup de recherches traitent de ses revendications
sociales, et surtout de son désir de lutte contre la misère psychologique et physique du
peuple noir. Il s’agit par exemple de l’étude de Victor Hountondji intitulée Le Cahier
d’Aimé Césaire : événement littéraire et facteur de révolution ; le critique y montre en
quoi ce poème en prose est une révolte contre l’oppression occidentale et un texte-guide
vers la redécouverte de l’identité ancestrale des Martiniquais. Césaire lui-même
s’exprime clairement à ce sujet dans son Discours sur le colonialisme et dans sa « Lettre
à Maurice Thorez », entre autres. L’autre élément important de mon travail, la vision
transfigurante du monde, s’observe facilement chez Césaire dans son apologie des
perceptions poétiques de la réalité, comme celle dominant l’appréhension du monde
cosmique selon la culture négro-africain ; l’auteur développe cette idée notamment dans
son essai «Poésie et connaissance» et son «Discours sur l’art africain». Il est
cependant peu commun d’adopter, comme je le fais dans ma recherche, une démarche qui
consiste à allier les deux préoccupations, à savoir revendication sociale et perception
poétique, et à constituer la seconde comme un tremplin à la première.