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1. Discours métaphysique : la fin du divin explicateur
Dans Les Mots et les choses, Michel Foucault pose le passage définitif de la
pensée occidentale à son ère moderne après la période révolutionnaire ; il statue que le
« début du XIXe siècle marque le seuil de notre modernité. L’ordre sur fond duquel nous
pensons n’a pas le même mode d’être que celui des classiques ».19 Le philosophe
remarque que cette épistémè nouvelle se fonde entre autres sur la manière de considérer
l’homme face au savoir. Plus particulièrement, l’homme se conçoit dorénavant comme
conscience qui connaît. A partir du XIXe siècle donc, l’être humain se présente
clairement et définitivement comme origine du discours sur la connaissance : c’est
désormais lui qui rend possible tout savoir. En d’autres termes, « l’homme dev[ient] ce à
partir de quoi toute connaissance p[eut] être constituée en son évidence immédiate et non
problématisée ; il dev[ient], a fortiori, ce qui autorise la mise en question de toute
connaissance de l’homme ».20
Il est évident que cet établissement définitif du caractère autonome et pensant de
l’être humain prend ses racines dans les discours des siècles précédents et s’inspirent
entre autres des réflexions de Michel de Montaigne, Biaise Pascal et René Descartes sur
les notions de sujet et de conscience. De plus, Foucault insiste sur l’importance du siècle
des Lumières dans l’instauration d’un usage public de la raison, qu’il définit ainsi:
« quand on raisonne pour faire usage de sa raison, quand on raisonne en tant qu’être
raisonnable (et non pas en tant que pièce d’une machine [c’est-à-dire en tant que jouant
un rôle dans la société, domaine de la raison privée]), quand on raisonne comme membre
19 Michel Foucault, Les Mots et les choses (Paris : Gallimard, 1966) 13.
20 Foucault, Les Mots et les choses 356.