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et dans des sens certes très divers, semble alors ‘convoqué’ par le débat social et
politique ».'78
De plus, la cible des critiques est désormais clairement identifiée : il s’agit de la
logique de vie dominante et ceux qui l’imposent. En effet, la Première Guerre Mondiale
conduit à constater, d’une part, que le monde occidental contemporain manque
cruellement de valeurs humanistes, témoignant d’une misère humaine ou sociale
omniprésente, et d’autre part, que cet état est la conséquence du système économique et
discursif qui y règne. Ainsi remarque Benoît, « [...] on comprend qu[e la guerre] est la
face sombre d’un modèle de société » dominant une Europe capitaliste et industrielle.179
Senghor insiste de même sur les défauts de la société actuelle, et en particulier sur le
manque d’une culture de l’entraide et de l’altruisme : « Ce que le monde moderne a
oublié, déclare-t-il, qui est une des causes de la crise actuelle de la civilisation, est que
l’épanouissement de la personne exige une direction extra-individuelle », c’est-à-dire une
démarche de vie humaniste et fraternelle.180 Plus précisément et dans le même ordre
d’idée, Sartre accuse le modèle économique porté aux nues par les civilisations
européennes et américaines d’être responsable de l’aliénation de certains groupes
humains tels que les peuples noirs et la classe ouvrière. Il déclare : « [l]e nègre, comme
le prolétaire blanc, est victime de la structure capitaliste de notre société ; cette situation
178 Benoît Denis, Littérature et engagement de Pascal à Sartre (Paris : Seuil, 2000) 228.
179 228.
180 Léopold Sédar Senghor, « Ce que l’homme noir apporte », 1939, Liberté l. Négritude et humanisme
(Paris : Seuil, 1964) 32.