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non, il y a, à l’heure actuelle, une civilisation éminente et tentaculaire. C’est la
civilisation européano-américaine, la civilisation industrielle qui couvre le monde de son
réseau [...] ».220 Puis, il dévoile le mécanisme aliénant qui marque cette démarche
capitaliste :
[...] avec la pensée européenne moderne [...], est née un processus
nouveau, celui que certains penseurs ont appelé un processus de
réification, c’est-à-dire de chosification du monde.
De quoi s’agit-il ? Il s’agit de la substitution à la totalité dialectique qu’est
le monde, de la substitution au monde concret et hétérogène, donc riche et
varié, d’une véritable algèbre d’abstractions. Homogénéisées et dissociées
représentant un abrégé du monde [...]. Les conséquences, vous les
connaissez, c’est l’apparition du monde mécanisé, du monde de
l’efficience [...].221
Plus précisément, cette dynamique d’appréhension du monde est néfaste à l’humanité
parce qu’elle engendre une réification de ce qui est perçu, y compris de l’humain même.
Ainsi, « [l’homme de la civilisation européenne] est devenu le prisonnier et la victime des
concepts et catégories qu’il avait inventés pour appréhender le monde » puisque
« l’homme devient chose à lui-même [...] ».222
Dans les relations entre les peuples et les groupes humains, cette démarche se
traduit tout d’abord par une mythification et un manque d’échanges avec l’autre, attitudes
qui conduisent au racisme, c’est-à-dire à « la chosification de l’autre, du nègre, du juif ;
220 100.
221 « Discours sur l’art africain » 101.
222 « Discours sur l’art africain » 101.