Cavelier de La Salle, 1643-1682 137
des Illinois, La Salle apprend ce changement. Il écrit à La
Barre, lui exposant les besoins de cette place sous laquelle
vingt mille Indiens rassemblés comptent sur la protection
française. Du portage de Chicago, il le supplie d’aider à
maintenir la confédération des tribus dont l’une, les Miamis,
attaqués par l’éternel ennemi, a déjà pris la fuite. Ces
lettres, La Barre les transmet au Ministre, qui n’est plus
Colbert mais Seigneley, mais en y ajoutant un rapport où la
découverte de La Salle est traitée d’imposture, et lui-même
accusé de vouloir se créer au loin, hors de tout contrôle un
royaume. Cependant, tout ravitaillement lui est refusé, et
la plupart de ses hommes, apprenant sa disgrâce se dé-
bandent emportant ses pelleteries, sa dernière ressource, et
quand il arrive à Frontenac, c’est pour apprendre qu’un
autre est en possession du Fort, et déjà sur la route il a
rencontré l’officier chargé par La Barre de prendre à Saint
Louis la place de Tonty. Au Canada, La Salle n’est plus
rien, mais il n’abandonne rien, il gagne Québec, et résolu
d’aller jusqu’au Roi, il s’embarque pour la France.
A Paris, à St Germain, il semblait condamné d’avance:
Louis XIV avait écouté La Barre: “Je suis convaincu, lui
avait-il déjà répondu, que la découverte du Sieur de La
Salle est inutile, que de telles entreprises ne tendent qu’à
débaucher les habitants et diminuer le revenu.” Et pour-
tant, à Versailles, le miracle opéré déjà deux fois par la pré-
sence de l’homme se répète. Aussitôt qu’on le voit, qu’on
l’entend, les préventions tombent. Il rappelle que le grand
Colbert jugeait de la dernière importance pour le service du
Roi un établissement sur le Golfe du Mexique, qu’à cette
fin, lui-même a parcouru plus de 5000 lieues, en grande partie
à pied, et sacrifié toute sa fortune. Il décrit la grandeur et
la fertilité de la Louisiane. Il ajoute que si on lui donne les
moyens d’établir au bas du Mississipi une place forte, un