Cavelier de La Salle, 1643-1682 127
sion rapide. Avant tout, il faut construire, à l’entrée du Lac
Ontario, un fort; pour La Salle ce sera un point d’ap-
pui à la grande expédition qu’il médite; pour Frontenac, un
point d’arrêt du libre passage des fourrures venues du Nord,
et qui lui en assurera le monopole. Les deux hommes s’en-
tendent vite. La Salle est envoyé à Onondaga, chez les
Iroquois, avec qui on est alors en paix, pour les préparer à
cette occupation, et les inviter à une réunion au Nord du
Lac où le Gouverneur leur parlera. Celui-ci part de Mont-
réal avec une force imposante: quatre cents hommes, cent
vingt canots, deux chalands armés. Vers le 10 juillet, la
Aotille arrive au Lac, y avance en ordre de bataille et ren-
contre bientôt les pirogues des chefs Iroquois. Leur nation,
disent-ils à Frontenac, les attend à Cataraqui. C’est le lieu
où La Salle les a convoqués, le point même que, sur une
carte envoyée au Gouverneur, il a indiqué comme le meilleur
site pour le Fort. Le 17 a lieu le grand colloque—les Fran-
çais debout, habits bleus et rouges, chapeaux à plumes;
les Indiens accroupis à terre et fumant gravement leurs
calumets. Frontenac, en langage imagé, leur adresse des
paroles d’amitié, mais d’autres aussi, faites pour leur in-
spirer la crainte de la puissance française. Ils ont entendu
parler des canons, et ils en voient deux sur les chalands.
Et devant eux, on creuse des douves, on travaille à des
palissades.
La vaste conception de La Salle comprenait toute une
chaîne de postes, du Canada au Golfe du Mexique. Or déjà
le gouverneur en construisant un Fort hors des limites du
Canada et sans en référer au Roi, avait dépassé ses pouvoirs.
Il était très combattu dans la colonie. Le nouvel intendant
Duchesneau, les Jésuites, puissants à la Cour, lui étaient
hostiles. Des lettres, des mémoires adressés à Colbert
l’accusaient—il le savait—d’abus d’autorité, de désobéis-