Cavelier de La Salle, 1643-1682 129
risations et de fonds avancés par de riches parents qui savent
ce qu’est maintenant son crédit.
Dès son retour, il se met à l’œuvre: Construction d’un
blockhaus sur le Niagara, au-dessus de la grondante cata-
racte, et en même temps, d’un navire de cinquante tonneaux,
“Le Griffon,” qui doit surveiller les Lacs.
Mais le brigantin qui amenait de Montréal les vivres et
le matériel s’est perdu dans les rapides. Il lui faut revenir
à Frontenac pour s’équiper à nouveau. Quatre-vingt lieues
à pied, à travers un pays infesté d’Iroquois. Chez lui un
second coup l’attend. A l’instigation d’une faction qui ne
lui pardonne pas la gêne apportée au libre commerce des
fourrures par la création du fort, ses créanciers ont saisi
toutes ses propriétés du Saint Laurent. Il est ruiné. Mais
il n’abandonne rien de ses projets. Jusqu’à la fin, cette âme
aura la grande vertu stoïque qu’a définie Milton: “!’indomp-
table volonté de ne pas céder.”
Au début du mois d’août—nous sommes en 1679—il est
revenu au Niagara, et il s’embarque sur le “Griffon.” Il
traverse le lac Erié dans le chenal de Détroit, et par tem-
pête déchaînée, entre dans les eaux furieuses du lac des
Hurons. A 500 kilomètres dans le Nord, il atterrit à Michili-
mackinac, et renvoie son navire chargé de pelleteries dont le
produit doit couvrir les frais de l’expédition. On ne reverra
jamais le “Griffon.” Lui-même, avec quatorze hommes et
quatre canots se met en route pour la grande aventure.
En ce moment, il s’agit d’atteindre la rivière St Joseph,
au Sud-Est du Lac Michigan, où, par la côte orientale,
Tonty doit le rejoindre. Nouvelles tempêtes; il faut cher-
cher des abris sur la rive, tirer les barques à travers les
brisants. Les Indiens menacent, les vivres manquent, on
se nourrit de fruits sauvages. Enfin, on aborde à l’embou-
chure du Saint Joseph où le “Griffon” devrait être. A-t-il