Cavelier de La Salle, 1643-1682 125
ac cadaver—il se pliait difficilement. Cette âme était faite
pour entreprendre. A vingt-quatre ans, il quittait l’habit
religieux.
On parlait beaucoup du Canada dans la famille. Un
de ses frères était prêtre sulpicien à Montréal; son père,
membre de la Compagnie des Cent Associés. Au printemps de
1667, il s’embarqua pour Québec. Il gagna tout de suite
Montréal, centre des Prêtres de Saint Sulpice, qui en avaient
la Seigneurie. Ce n’était, sur le Saint Laurent, qu’une brève
ligne de pignons dominés par la grande maison du Sémi-
naire, l’Hôtel Dieu et par le Fort qui la défendait contre
les Iroquois, toujours à l’affût dans la campagne environ-
nante. Les Ecclésiastiques lui offrirent, à trois ou quatre
lieues à !’Ouest, au dessus des rapides et du Lac St Louis,
un petit fief, périlleux avant poste contre les attaques de
ces terribles sauvages. C’est le domaine qu’on appela plus
tard, ironiquement, la Chine, quand on su que Cavelier
partant de là, prétendait trouver la route de l’Asie.
Il y fit œuvre de Seigneur féodal, protégeant ses colons,
organisant la défense, fondant un village qu’il entoura de
palissades. Mais son rêve allait bien plus loin; en vue de
ces explorations il apprenait plusieurs dialectes indiens. Ses
papiers de famille, qu’a vus Parkman, disent que dès 1668,
il s’aventura dans le Nord, pour en revenir convaincu qu’il
n’y avait rien à chercher dans cette direction. Un jour, ra-
conte l’historien américain, des coureurs Indiens lui par-
lèrent d’un grand fleuve dans le Sud, et qui se jetait dans
une mer si lointaine qu’il fallait huit ou neuf mois pour
l’atteindre. Là dessus, la conception qui allait diriger sa
vie se décida. II courut à Québec. Il savait se faire
écouter; et obtint du Gouverneur de Courcelles des lettres
patentes qui autorisaient l’entreprise. Mais elle se ferait à
ses frais; il vendit son domaine, et en tira ce qu’il fallait