Le directeur est conscient que sa fonction n'est absolument plus du tout "conquête,
commandement et contrôle". Plus possible de contrôler les traducteurs grecs ou finlandais,
slovènes hongrois etc. Sa fonction est de :
1. Soigner l'outil de production: les intellectuels qui font le travail et qui sont plus compétents
que lui dans leurs domaines respectifs, notamment les langues. Il faut qu'ils aiment leur milieu
de travail et acceptent de continuer à travailler dans la firme. Bref il doit les motiver pour
qu'ils reviennent le lendemain matin avec leur "outil de production", leur intelligence.
2. Contrôler la qualité du travail. Mais comment faire pour contrôler la qualité du travail?
Alors qu’il est incapable de connaître toutes les langues. Il a eu une idée de génie : mettre les
membres de son équipe en réseau avec les personnes extérieures qui ont écrit les discours,
avec les responsables des systèmes de traduction officiels, mais aussi avec les ambassadeurs,
partis politiques, syndicats, media etc. Et cela pour chaque langue. Et ainsi il a crée un
nouveau système de contrôle de qualité, autogéré par les réseaux linguistiques qu'il a suscités.
Car tous les grecs au sein du réseau grec ont avantage à ce que le texte soit parfait. Il ne s'agit
pas de commencer le débat politique sur une base inexacte.
3. Veiller à ce que la communication fonctionne bien au sein de l'entreprise, et avec
l’extérieur: avec les autres traducteurs des autres langues. Si l'on a un problème avec une
langue il est très possible que certaines ou toutes les autres langues l'aient aussi. Il est
absolument indispensable que la politique de traduction soit harmonieuse. Mais également, il
est crucial que chacun des traducteurs aient d’excellentes relations avec les cabinets de la
Commission, et ceux qui produisent les documents.
4. Veiller au capital humain: Leur fournir les occasions de recyclage et de formation
continue: congrès, voyages contacts etc..
5. Veiller à la valeur immatérielle de l'entreprise: la qualité de l'ambiance, des relations avec
le personnel. L'implication sociale de l'entreprise dans le quartier...
6. Veiller aussi au plan de carrière de chacun. Afin que son travail au sein de l'entreprise
s'inscrive dans un plan de carrière personnel... au sein même de l'entreprise...et pas ailleurs!
Bref nous sommes dans un autre monde... Mais l’histoire n’est pas finie...
On a offert au directeur de ASKO un sac de millions d'€ pour acheter son entreprise. Et il a
accepté. Le lendemain, le nouveau directeur (étranger) est arrivé et a commencé à donner des
ordres arbitraires à tout le monde. Ce nouveau manager fonctionnait selon le modèle du
management industriel classique de "commande et contrôle". Deux jours plus tard une partie
du personnel donnait sa démission. Une semaine plus tard le contrat avec la Commission était
suspendu. Et l'action en bourse perdait énormément! Que faire? Le nouveau directeur a
compris ...un peu tard. Il a réengagé l'ancien directeur, qui a accepté de revenir, mais en étant
grassement payé! Ce dernier a téléphoné à tout le monde et tous sont revenus. Le contrat a été
rétabli. L'action est remontée.
Excellent exemple de transition du management de la société industrielle au management de
la société de la connaissance! Il ne s'agit pas on le voit de se tromper de logique de
gouvernance. On ne peut pas être un chef d’entreprise « industriel » dans une entreprise de
connaissance. Cela peut coûter cher, très cher. Gare à ceux qui ne comprennent pas le
changement. Cet exemple me semble l'exemple le plus clair du changement de management
dans la nouvelle société de la connaissance. On voit clairement la différence structurelle
concrète avec la société industrielle. Mais voyons les choses plus en détails.
2.1. Le pouvoir
Nous assistons à un basculement progressif mais fondamental du pouvoir. En prendre